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Accord mets vins : la blanquette de veau

Alors, quel vins avec la blanquette ? Car pour un bon accord vins blanquette, il y a quelques règles.

"Comment est votre blanquette ?"

S’il s’agit d’un des plats préférés des Français, la blanquette de veau est également un des plats préférés des sommeliers. Parce que les sommeliers sont gourmands, mais aussi parce que l’accord vins et blanquette est relativement simple.

Vous aimez le chardonnay ? Parfait. Les blancs du Rhône ? Très bien. L’Alsace aussi ? Superbe ! Et la Loire, vous les aimez les vins de Loire ? Évidemment. 

Si simple que ça ? Oui, mais non. il subsiste néanmoins une zone d’ombre pour certains gourmets. Comment faire quand on aime la blanquette, mais qu’on ne boit pas de vin blanc ? Un pot de Brouilly ? Voyons ça dès maintenant.

Prochain article, les harengs pomme à l'huile.

Histoire et spécificité de la blanquette

Origine

En 79 pages, Jean-Louis Flandrin le confirme : la blanquette ne s’est pas faite en un jour. La blanquette de veau. Histoire d’un plat bourgeois, livret de cuisine passionnant (on écrit vraiment sur tous les sujets !) retrace le débat séculaire sur l’origine de la blanquette en nous mettant par la même occasion l’eau à la bouche, cela va sans dire. Sans parent officiel, il s’agirait d’un plat qui se serait construit en différentes phases, dans différentes régions, à différentes époques.

Une origine moyenâgeuse ? Peut-être, c’est en tout cas ce que Marie-Hélène Baylac avance en évoquant un plat typique de l’époque, le brouet de poulet, dans son Dictionnaire gourmand.

Mais pour Jean-Louis Flandrin, l’acte de naissance de ce plat daterait du XVIIIe siècle. Pour preuve, la première recette écrite, en 1735, par Vincent de La Chapelle dans l’ouvrage Cuisinier moderne. A l’époque, il n’existe qu’une blanquette, et elle est exclusivement de veau. Ce mets à l’origine constitué de restes de rôti était servi en entrée sans autre accompagnement que des oignons grelots et des champignons de Paris. 

La blanquette, dont l’origine géographique est impossible à déterminer, constitue, selon Jean-Louis Flandrin, un mets bourgeois par excellence. En 1752, le supplément du Dictionnaire de Trévoux soulignait que « la blanquette est fort commun chez les bourgeois lorsqu’ils ne sont qu’en famille ». Car qui oserait servir des restes aux invités ?

Évolution

Au siècle suivant, Jules Gouffré, chef du Jockey Club, présente en 1837 une recette à base de veau cru que l’on fait bouillir. Avec ce passage du rôti au bouilli, la consommation de ce plat va se démocratiser. Elle sera évidemment mentionnée en 1903 dans Le Guide culinaire de Georges Auguste Escoffier et porte le nom de « Blanquette de veau à l’ancienne de ma grand-mère ». On la sert généralement avec des nouilles.

Puis, à partir de la seconde guerre mondiale, la blanquette se servira plus traditionnellement accompagnée de riz blanc.

À la fin du XXe siècle, le plat se évoluera au point de voir se multiplier les blanquettes de volaille et même de poisson dans les années 1980-1990. Consécration ultime : en 2006, notre blanquette nationale est élue plat préféré des français.

Le roux blanc, et la crème

La grande particularité de la blanquette, c’est bien sûr sa sauce. Nappante et bien lisse, elle est réalisée grâce à un mélange de roux blanc et de crème fraîche. Le roux est une préparation à base de matière grasse (souvent du beurre) et de farine. Elle est ensuite mouillée par un bouillon pour obtenir cette sauce inimitable. Et c’est précisément cette sauce qui va nous intéresser pour réaliser notre accord mets vins…

Si le veau est une viande pouvant se marier aisément avec le blanc et le rouge, la sauce de la blanquette pose une contrainte plus particulière : la matière grasse, et la protéine de lait. Ces deux éléments dénotent potentiellement avec certains vins rouges, notamment ceux qui cachent leur acidité et ceux qui offrent les tanins les plus rugueux. Un mic-mac des plus instables qui anéantit toute harmonie en bouche et rabaisserait le plat, comme le vin.

Donnons donc la part belle au vin blanc pour aujourd’hui.

À l'ancienne 😎

Quel vin blanc avec la blanquette de veau ?

Suffisamment vif pour apporter du tonus à un plat bien gourmand, mais avec de la matière pour ne pas se laisser dominer… Ne serait-il pas l’heure d’appeler super Chablis ?

Le chardonnay

Roi incontesté de la Bourgogne, la texture du chardonnay semble avoir toutes les qualités requises pour la blanquette de veau. Rond, parfois gras, il offre en bouche la minéralité salivante que nous lui connaissons, surtout dans la région chablisienne. À l’image du domaine Moreau-Naudet, le chardonnay de Chablis se pare d’un équilibre à la fois frais et enveloppant, parfait pour notre blanquette !

Les vignobles du sud Bourgogne ne sont pas en reste, avec notamment les terrains siliceux, sableux et argileux du Mâconnais, qui donnent vie par exemple aux somptueux Saint-Véran. Ces vins amènent une touche un peu plus mûre à votre accord mets-vins avec des notes de pêche et de poire, voire de miel d’acacia pour les plus solaires.

Le chenin blanc

Autre grand accord mets vins franco-français : la blanquette de veau et le chenin blanc de Loire. Bercé dans la douceur angevine et forgé dans la dureté des sols de schiste et de tuffeau, le ch’nin nous offre à table un parfait complément à la matière parfois gélatineuse du veau, enveloppée dans cette crème généreuse de la blanquette. L’AOC Anjou regorge de vins parfaits pour ce plat.

Si mon instinct m’orienterait vers un chenin plutôt droit et sec comme peut les produire Pierre-Olivier Bonhomme par exemple, je ne serais pas contre l’idée d’ouvrir un vin plus crémeux, comme Les Tuffeaux de François Chidaine, un Montlouis demi-sec d’exception.

Les vins blancs du sud

Disons le grand sud, avec son est, et son ouest. De l’impact de certains Pessac-Léognan à la richesse des blancs du Rhône comme les Saint-Joseph ou les Crozes-Hermitage, je ne sais que choisir. Peut-être un macabeu du Roussillon ou un Jurançon sec ? Non vraiment, avec la blanquette et les blancs du sud, le temps dure longtemps, et la vie sûrement, plus d’un million d’années...

L’Alsace

Quand j’évoquais le chenin blanc légèrement moelleux, mes papilles ont tout de suite fait le rapprochement entre ce type de vin et les grands pinot gris d’Alsace. Surplombant la cité médiévale de Turckheim, le grand cru Brand et ses granits fournissent à la fois la gourmandise et la tonicité que requiert cet accord mets vins. À Frankstein, les arômes de fruits mûrs répondent à la grande minéralité de son terroir pour former un allié indéfectible à la blanquette de mère-grand.

Niedermorschwihr près de Turckheim. © Ignacio Haaser

Accord Vins rouges et blanquette ?

Je ne vous jette pas la pierre, Pierre. Mais par pitié, oubliez les vins rouges tanniques et charpentés. De manière générale, les rouges corsés se marient assez mal avec la protéine de lait : fromages, desserts…

Il m’est arrivé dernièrement d’ouvrir un pinot noir d’Alsace en présence d’une blanquette de veau. Quelle ne fut pas sa surprise quand elle se retrouva associée à un vin rouge certes, mais si fripon et si léger !

Pour les amateurs de Beaujolais, pensez à le choisir dans la même veine. Souple, fin, très fin… comme un Brouilly, si cher à notre OSS117.

Pour les amateurs de vins naturels, il existe aujourd’hui de si nombreux exemples pouvant également remplir les conditions de cet accord mets vins. Les précieux conseils de votre caviste seront alors bien utiles.

Les vieux vins rouges et leurs tanins patinés peuvent également convenir. Si votre budget vous le permet, les vins de Bourgogne conviennent parfaitement… les vieux vins de Bourgogne conviennent tout le temps, toute la vie en fin de compte.

Voilà, j’espère que vous en savez plus et que vous cet article vous a donné envie de vous mettre aux fourneaux ! Pour le choix de la recette, aucune prise de risque, avec le patron, le chef Philippe Etchebest. 

En passant, j’aime beaucoup son conseil sur la découpe des oignons. « Si vous ne voulez pas pleurer en épluchant des oignons, vous le faites faire à quelqu’un d’autre, voilà. »